Un diagnostic de cancer de l’œil peut être bouleversant. « On n’imagine jamais qu’on pourrait avoir quelque chose comme un cancer de l’œil, confie une personne de 54 ans atteinte d’un mélanome uvéal, la tumeur oculaire la plus fréquente chez les adultes. C’était accablant, et j’avais énormément de questions. »
Un cancer de l’œil peut être difficile à diagnostiquer. De nombreuses tumeurs oculaires sont bénignes et, souvent, pour savoir lesquelles sont cancéreuses, il n’y a d’autres choix que de surveiller leur croissance ou de pratiquer une biopsie, laquelle consiste à retirer des cellules de la tumeur ou de l’œil à l’aide d’une aiguille. Les médecins préfèrent n’effectuer les biopsies que si elles sont absolument nécessaires, car il est difficile de prélever un échantillon de la tumeur sans endommager l’œil ni propager le cancer, et même des biopsies réussies peuvent être douloureuses ou effractives pour les personnes qui les subissent.

Pour offrir une solution de rechange, le Dr Zaid Mammo et son équipe à l’Université de la Colombie-Britannique ont utilisé une Subvention Défi de la SCC pour élaborer une forme d’imagerie de l’œil appelée tomographie par cohérence optique à diversité de polarisation (TCO-DP). Cette forme d’imagerie vise à reconnaître des tumeurs cancéreuses dans l’œil et même à repérer des tumeurs bénignes qui montrent des signes d’évolution vers un cancer.
« Cette technologie aide les médecins à voir beaucoup plus en détail ce qui se passe à l’intérieur de l’œil, sans devoir recourir à la chirurgie, explique la personne atteinte d’un mélanome uvéal, dont le cancer a été surveillé par TCO-DP. Les problèmes peuvent donc être interceptés plus tôt et être traités avant qu’ils s’aggravent. »
Le mélanome uvéal est un diagnostic sérieux, et son pronostic a peu changé depuis 50 ans. C’est pourquoi il est important de soutenir des études de ce genre. « Le financement de la SCC nous a permis de construire le prototype, de le valider dans des milieux cliniques et d’aider l’équipe de recherche à faire avancer la technologie, dit le Dr Mammo. Chaque dollar nous rapproche d’un impact en contexte réel pour les patients. »
Les chercheurs en sont à évaluer l’efficacité de leur technologie dans leur clinique, et espèrent une mise en œuvre dans des cliniques partout au Canada. « Nos études pilotes ont indiqué un potentiel prometteur pour distinguer des changements dans un mélanome récidivant qui n’avaient pas été signalés auparavant, ajoute le Dr Mammo. Nous souhaitons pouvoir utiliser ces changements pour poser un diagnostic en cas de lésions suspectes. »

La Dre Katherine Paton, chef du Service d’oncologie oculaire au Eye Care Centre de Vancouver, utilise déjà la technologie du Dr Mammo. Au lieu d’attendre que les tumeurs oculaires grossissent au fil du temps, des médecins comme elle pourraient, grâce à cette technologie, diagnostiquer et traiter un cancer de l’œil tôt et de manière non effractive. « Il y aura moins de métastases et une meilleure survie à long terme si les cancers sont décelés tôt », explique-t-elle.
Toutefois, la recherche est essentielle à la poursuite de ces progrès. « Des innovations comme la TCO-DP n’arriveront pas sans investissements dans des recherches de niche à fort impact, dit la Dre Paton. Le financement nous aide à passer d’un soupçon clinique à des diagnostics précis en temps réel qui sauvent des vues et des vies. »